Ce colloque a comme modératrice Dorothée Dibie conseillère à la cour d’appel de Paris. Lors de ce colloque sont intervenus :
- Hervé Causse, professeur de droit privé et science criminelles à l’université de Clermont Auvergne et directeur de l’Institut des métiers et de l’administration de la justice de l’Ecole de droit ;
- Anne Lise Courault, expert-comptable, commissaire aux comptes et associée du cabinet Nexia S&A ;
- Richard Diallo, associé du cabinet Nexia S&A ;
- Priscillia Rossi, fondatrice et président de Leihia, spécialiste du numérique au sein des entreprises.
La modératrice introduit ce colloque en précisant que « la création de nouveaux outils oblige l’utilisateur à apprendre à s’en servir. Elle modifie sa manière d’agir exigeant une capacité d’adaptation. Cela crée une disparité entre ceux qui ont su acquérir les nouvelles techniques et qui développent leurs connaissances, augmentent leur facilité d’action et leur productivité au détriment de ceux qui n’ont pas eu ou pu avoir accès à ce savoir ». Ainsi, il y aurait une sorte d’évolution constante de la machine par l’Homme et de l’Homme pour la machine. Cette évolution serait notamment particulièrement prégnante au sein du monde du travail et de l’entreprise. Plus précisément Dorothée Dibie nous interroge sur l’incidence du développement du numérique et plus particulièrement de l’IA sur le travail en entreprise et sur son impact en termes d’emploi, sur les métiers de demain.
L’impact du numérique pour le monde de l’entreprise
Richard Diallo souligne l’évolution du numérique et de son impact dans l’entreprise. Tout d’abord il souligne que « les années 90 ont marqué un tournant comme le numérique n’a pas seulement impacté les entreprises mais également le grand public avec internet ». Les entreprises se sont transformées, chacune avec son rythme et ses valeurs tout en répondant au même schéma :
- « Compétitivité ;
- Efficacité opérationnelle ;
- Innovation »
Outre ce schéma il y a des évolutions au sein du monde de l’entreprise avec la « diminution des emplois traditionnels et l’émergence de nouveaux métiers tel que Chief Data Officer, Data Scientift. En plus de cela, de nouvelles compétences sont attendues notamment en ingénierie et en informatique » démontre Anne Lise Courault.
De plus, la cybersécurité devient un enjeu crucial au sein des entreprises « pour préserver dans un univers numérique en pleine expansion que ce soit pour les entreprises ou les particuliers » selon Richard Diallo. Effectivement, d’après le rapport Phishing Threat Report 2023 « 89% des messages indésirables parviennent à passer les méthodes d’authentification des courriels ». Ainsi, la sécurisation du télétravail, la formation et la sensibilisation des utilisateurs, la sécurité des systèmes cloud deviennent primordiaux pour assurer le bon fonctionnement des entreprises, la sécurité des particuliers et la sécurité des données.
L’évolution des recrutements par les RH au sein des entreprises
Le numérique transforme la fonction des ressources humaines au sein du monde de l’entreprise. Dans cette perspective, Priscillia Rossi énonce que l’IA s’invitera dans les futures procédures de recrutement. A titre d’illustration les profils de postes seront rédigés par des IA, les IA conversationnelles seront le premier filtre, le bilan social sera projeté avec simulation en temps réel.
Par l’invitation de l’IA au sein des futures procédures de recrutements des effets vont se produire. Ces effets se traduiront par des recrutements plus précis et des candidats plus épanouis. Priscilla Rossi met en évidence quelques pourcentages pour souligner ces propos :
- « 40% réduction du temps d’embauche – gain de temps et d’efficacité pour soutenir la croissance organique des entreprises ;
- 62,5% taux d’utilisation de l’IA dans les processus de recrutement – une adoption massive au service de l’efficacité des recrutements ;
- 27% réduction du turnover – dans les entreprises qui utilisent dès à présent les outils du futur du recrutement ;
- 98,7% taux de satisfaction des candidats – les candidats se déclarent satisfaits des Nouvelles solutions de recrutement.»
La situation nouvelle du juriste d’entreprise à l’ère du numérique
Hervé Causse continue en soulignant que « les juristes deviennent dépendants des langages informatiques ». L’intervenant démontre que le droit de l’entreprise a changé en concept, sources et process. Pour lui, « le juriste aujourd’hui travaille avec et pour des systèmes électroniques et numériques ainsi que sous les auspices du régulateur du numérique. Le juriste d’entreprise est sous une situation nouvelle ». Le numérique a eu des impacts sur le droit pouvant s’illustrer par quelques exemples soulignés par l’intervenant :
- « Le rôle du juriste a changé puisque le numérique a transformé la forme. En effet, il a changé la forme et pas seulement la forme du support mais également celle du langage. Cela s’explique par le fait que peu importe que ce soit une image, un son, un texte de langage naturel le langage information permet de le transformer en code numérique.
- Le numérique a transformé les lieux, les a fait disparaître. La dématérialisation du numérique est en marche depuis très longtemps. Le lieu est devenu abstrait et, en même temps, il est devenu paradoxalement multiplié tel que le démontre l’exemple de la blockchain. Au sein de ce paradoxe, la tâche du juriste d’entreprise est fort difficile.
- Le numérique est une transformation majeure des biens. Les biens sont devenus quelque chose de totalement immatériels mais souvent illocalisables. Le juriste a besoin de comprendre les choses et de les appréhender. Néanmoins il est compliqué de l’appréhender quand cela se situe au niveau de l’immatériel.
- Également, le numérique a transformé l’entreprise qui est parfois juste un site internet voire une plateforme. L’entreprise est aussi systématiquement aujourd’hui une structure informatique. Cela s’appelle un système et non pas d’exploitation mais d’information.»
Rediffusion du colloque « Les transformations du droit de l’entreprise et de ses métiers »