2024, l’urgence de la formation des salariés à l’IA générative


2024, l’urgence de la formation des salariés à l’IA générative
Chaque mois, le cabinet de conseil Sia Partners décrypte pour Liaisons Sociales la révolution IA et ses impacts sur les ressources humaines. Cette chronique est signée par Sébastien Vernède, associé RH & Transformation chez Sia Partners.

Fin 2022, la révélation du potentiel de ChatGPT au grand public a été un choc. Du jour au lendemain, les technologies d’intelligence artificielle générative, réservées jusque-là quelques experts, ont été mises dans les mains de tous avec une interface intuitive et des résultats impressionnants. De nombreuses études ont alors annoncé une déferlante qui allait bouleverser le monde du travail en quelques mois et transformer, voire détruire, des centaines de millions d’emploi.

Pourtant, la révolution annoncée a à peine commencé : si quelques salariés utilisent discrètement ChatGPT (le plus souvent sans en informer leur entreprise), l’IA générative ne fait pas encore partie de notre quotidien professionnel et les gains de productivité attendus se sont rarement concrétisés.

En 2024, la donne pourrait radicalement changer : le déploiement progressif dans les entreprises des applications des géants du numérique (Google, Microsoft) et le recul d’un an d’expérimentations diverses font que les conditions d’une transformation en profondeur des modes de travail sont désormais réunies.

Pour en tirer le plein potentiel et construire un avantage concurrentiel, l’urgence est de sensibiliser, former, et accompagner la prise en main de ces outils et ce, à tous les niveaux de l’entreprise.

1.Sensibiliser et former tous les collaborateurs

Les attentes des salariés sur le sujet sont énormes (86% d’entre eux réclament des formations à l’IA). Une acculturation de tous, via des contenus pédagogiques et transparents sur les bénéfices et limites de ces technologies, est incontournable pour permettre une adoption sereine par l’ensemble des collaborateurs. Cela peut passer par des conférences et des formats webinaires mélangeant apports théoriques de base, de nombreux exemples et illustrations, et des temps de prise en main.

Par ailleurs, le déploiement progressif de Microsoft Copilot (et ses équivalents) va permettre à des millions de salariés d’utiliser l’IA générative directement dans leurs outils du quotidien, que ce soit pour analyser un tableur, mettre en forme une présentation, rédiger des courriels ou produire un compte rendu. Le coût élevé de ces fonctionnalités additionnelles (30$/mois par utilisateur) impose de s’assurer d’un retour sur investissement. Pour cela, il est urgent de former les salariés avec un maximum de mise en pratique : panorama des fonctionnalités, bonnes pratiques, points d’attention, optimisation des résultats par la rédaction de « prompts ».

2. Mobiliser l’intelligence collective des experts métiers

Ces derniers mois, beaucoup ont voulu trouver des applications métier à l’IA générative, en partant de la solution qu’ils utilisaient déjà ChatGPT. Cette façon de partir de la solution pour chercher un problème à résoudre a pu amener à des applications gadget avec une prolifération de chatbots plus ou moins spécialisés et, finalement, peu de valeur ajoutée.

Pour éviter ces écueils, accompagner les équipes par de la formation et des ateliers de design thinking est une méthode puissante pour, à la fois, mobiliser l’intelligence collective, prioriser les idées en fonction de la réalité du problème visé, et toujours se recentrer sur l’utilisateur final. En associant des experts techniques à ces approches, on s’assure de la faisabilité des applications et de leur intégration dans l’environnement de travail existant.

Bien menée, ce type d’approche pourra aboutir au développement d’un ou deux usages de l’IA générative par métier (pas nécessairement sous la forme d’un chatbot), apportant une valeur ajoutée immédiate et évidente pour tous : l’automatisation de certaines tâches ou le développement de nouveaux services. Ce sont ces premiers succès modestes et ces approches appliquées qui permettront une montée en compétence des équipes et contribueront à la conduite du changement autour de l’adoption de l’IA générative.

3. Consolider la vision stratégique des dirigeants par de la formation appliquée et des retours d’expérience

Enfin et surtout, dans cette grande effervescence, avoir une vision, un cap et une méthode est incontournable. Pour cela, les dirigeants sont amenés à se poser de nombreuses questions :

  • Quelle est la vision des enjeux induits par l’IA générative pour le secteur d’activité et l’entreprise ? Est-elle claire, partagée et déclinée à tous les niveaux ?
  • Quelles sont les pratiques d’organisations faisant face aux mêmes enjeux ?
  • Quels retours d’expérience ont démontré leur valeur ?
  • Comment organiser et prioriser ces innovations dans l’entreprise ?

Pour y répondre, la formation des dirigeants sur l’IA générative est clef, au-delà des conférences et prises de parole d’experts. Elle doit permettre une compréhension fine des enjeux et potentiels de ces technologies ; et outiller la direction générale pour incarner le leadership sur ces sujets, aujourd’hui encore très souvent portés par les équipes informatiques ou data.

Tout l’enjeu est de proposer aux dirigeants une grille de lecture complète à même de consolider leur vision stratégique via des apports théoriques, une vision prospective, de la mise en pratique, des retours d’expérience, des rencontres avec d’autres entreprises, des chercheurs… Tous ces contenus peuvent être condensés sur des temps courts de type « learning expedition » ou sur un parcours sur un temps plus long.

En conclusion, l’innovation permise par l’IA générative est une course de fond, et les entreprises qui tiendront la distance seront celles qui se seront bien préparées. La formation doit être au cœur de cette bonne préparation avec des objectifs et une pédagogie adaptés à chaque public.

Sébastien Vernède
Associé RH & Transformation chez Sia Partners