Travailler au croisement du droit et de la technologie
Collaborer avec des profils techniques au sein d’une startup spécialisée en intelligence artificielle appliquée au droit constitue une expérience particulièrement formatrice et stimulante. Chez certaines jeunes entreprises développant des solutions d’IA destinées aux avocats, jusqu’à 80 % des collaborateurs sont issus de formations techniques. Cette prédominance impacte profondément le rôle traditionnel du juriste. Au-delà de la rédaction de contrats, de la gestion de la conformité, ou encore des conditions générales de vente (CGV) et d’utilisation (CGU), le juriste est amené à co-développer le produit. Cette interaction directe avec les ingénieurs et développeurs est à la fois stimulante et fascinante, car elle repousse les frontières classiques du métier juridique.
Les nouveaux visages du droit : les « drôles de juristes »
Lors des récents rendez-vous consacrés aux transformations du droit, une nouvelle génération de juristes atypiques s’est fait remarquer. Surnommés « les drôles de juristes » ou encore « les moutons à cinq pattes », ces profils allient des compétences variées et une forte appétence pour l’innovation.
Parmi eux, Joe Pearn, jeune étudiant en droit à l’Université Paris 2 Panthéon-Assas, illustre cette dynamique. Il incarne cette jeunesse juridique passionnée par la transformation du secteur. Président de l’association Assas Legal Innovation, il est également engagé dans des programmes européens visant à former les juristes aux enjeux internationaux et technologiques. Son parcours est l’occasion d’explorer les aspirations des jeunes talents qui souhaitent mêler droit, technologie, finance et développement durable.
Un parcours international et multidisciplinaire
Né d’une mère britannique et d’un père allemand, Joe Pearn a grandi dans un environnement multiculturel, baigné dès le plus jeune âge dans une diversité linguistique et culturelle. Après un passage par le lycée franco-allemand, il intègre un cursus unique en droit européen à Paris 2, qui s’étend sur cinq ans. Ce programme lui permet d’étudier simultanément les systèmes juridiques français, allemand et anglo-saxon (Common Law), tout en passant des périodes d’études dans différentes capitales européennes, comme Berlin, Londres ou Athènes.
Cette formation multiculturelle et multijuridique ouvre des perspectives larges et encourage une réelle ouverture d’esprit, essentielle dans un monde juridique en pleine mutation. Joe Pearn souligne l’importance d’être en contact avec des professeurs internationaux et d’étudier des systèmes juridiques variés, ce qui enrichit son approche et sa compréhension globale du droit.
L’importance d’une démarche proactive et pluridisciplinaire
Malgré un parcours qui pourrait le conduire naturellement vers un cabinet d’envergure internationale, Joe Pearn privilégie une approche ouverte et curieuse. Il estime que la période universitaire est idéale pour expérimenter, poser des questions et toucher à diverses disciplines. En effet, même si le droit reste son domaine principal, il profite de ses temps libres pour rencontrer des professionnels de secteurs variés : entrepreneurs, universitaires, experts du digital, etc.
Cette démarche proactive est encore rare chez les étudiants en droit, souvent cantonnés à une méthode plus traditionnelle, basée sur l’écoute passive des cours et la répétition en travaux dirigés. Pour Joe Pearn, cette curiosité et cette capacité à aller au-delà du cadre académique sont essentielles pour se préparer aux évolutions du métier juridique.
Former les juristes aux nouvelles technologies : un enjeu fondamental
Joe Pearn insiste également sur la nécessité d’intégrer davantage les outils technologiques dans la formation juridique. Les tâches répétitives et à faible valeur ajoutée, souvent réalisées par les stagiaires ou collaborateurs juniors, sont aujourd’hui assistées, voire remplacées, par des solutions numériques. Il devient donc primordial que les futurs juristes soient formés à l’utilisation professionnelle de ces technologies, afin de conserver leur pertinence et leur valeur ajoutée.
Si cette intégration commence à émerger dans des associations ou des programmes spécifiques de legal tech, elle reste marginale dans les cursus classiques, notamment dans les licences. Pourtant, des initiatives existent, comme les summer schools en finance organisées par HEC Paris, auxquelles Joe Pearn a participé, permettant de toucher des domaines voisins et d’élargir ses compétences.
L’engagement associatif comme levier de formation et d’innovation
Par ailleurs, l’implication dans des associations étudiantes telles qu’Assas Legal Innovation joue un rôle clé dans cette dynamique. Cette structure vise à initier les juristes aux nouvelles technologies, en proposant notamment de la veille juridique hebdomadaire sur les innovations du secteur. Cela permet de sensibiliser les étudiants à la transformation digitale du droit et de les préparer aux défis futurs.
Joe Pearn illustre ainsi la nouvelle génération de juristes, capable de conjuguer rigueur académique, ouverture internationale, curiosité technologique et engagement collectif. Son parcours est un exemple inspirant pour les étudiants, les professionnels du droit et les entreprises désireuses d’attirer et de retenir ces talents hybrides et innovants.
L’importance des expériences professionnelles dans la formation juridique moderne
Dans le contexte actuel de transformation profonde du monde professionnel, la formation juridique ne peut plus se limiter à l’acquisition théorique des connaissances. Comme le souligne Joe Pearn, jeune étudiant engagé dans une dynamique innovante, les expériences pratiques sont devenues indispensables pour saisir pleinement les enjeux du métier. Au-delà des enseignements classiques dispensés à l’université, des initiatives telles que la rédaction d’articles co-construits avec des avocats, ou encore l’organisation de conférences et d’ateliers, permettent aux étudiants d’approcher concrètement le monde professionnel. Ces dispositifs ouvrent les horizons, offrant une immersion dans des environnements en mutation et invitant à une autonomie proactive.
La quête d’un stage : une démarche proactive et audacieuse
Obtenir un stage, en particulier en licence 3, peut s’avérer difficile, mais Joe Pearn illustre parfaitement l’attitude à adopter pour réussir. En identifiant une opportunité chez Gemini, start-up développant de l’intelligence artificielle pour le secteur juridique, il n’a pas hésité à contacter directement un ingénieur qu’il connaissait, pour mieux comprendre leur travail et solliciter un stage. Cette démarche active, même si elle n’a pas abouti immédiatement, a permis de décrocher une convention et ainsi de passer un mois dans un environnement d’innovation à Station F, haut lieu de l’entrepreneuriat parisien.
Cette expérience s’est révélée particulièrement enrichissante. Travailler dans une équipe majoritairement composée de profils techniques a permis à Joe Pearn de comprendre la double casquette du juriste augmenté : non seulement assurer les fonctions classiques comme la rédaction de contrats ou la compliance, mais aussi co-développer des produits en interaction avec les ingénieurs. Ce rôle hybride requiert une compréhension des contraintes techniques ainsi qu’une capacité à transmettre clairement les besoins des utilisateurs juridiques. La co-construction est au cœur de cette nouvelle fonction, qui vise à rassurer à la fois les équipes internes et les clients, souvent des directions juridiques.
Se préparer aux métiers émergents du droit
Joe Pearn se sent aujourd’hui prêt à intégrer un Master 1 ou 2 en Legal Engineering, une formation innovante destinée à former ces juristes hybrides et technophiles. Son approche repose sur un équilibre entre la maîtrise solide des fondamentaux juridiques — qu’il insiste pour bien assimiler avant de déléguer certaines tâches automatisables — et la curiosité d’explorer des horizons variés.
Il affirme que si l’automatisation prend de l’ampleur, la compréhension profonde des mécanismes juridiques reste incontournable, d’où l’importance de persévérer dans la lecture et l’étude, notamment en bibliothèque. Cette assiduité académique ne l’empêche pas d’être très ouvert aux diverses portes qui s’ouvrent aujourd’hui, des professions plus traditionnelles dans les cabinets ou directions juridiques aux métiers plus récents, notamment dans les startups fintech, la blockchain, ou encore la finance.
Un regard large sur les débouchés professionnels
L’expérience passée chez CACIB, banque d’affaires, a également contribué à élargir sa vision des métiers du droit. Il a pu y constater la polyvalence du juriste, qui intervient dans de multiples départements, du front office à la salle des marchés, soulignant ainsi la transversalité du droit dans les secteurs économiques. Cette diversité des fonctions montre que le juriste ne se limite plus à la conformité ou aux tâches administratives, mais joue un rôle actif en gestion de projet, pilotage d’initiatives, et participation stratégique au développement des entreprises.
Conseils pour les jeunes générations : curiosité et ouverture au monde
Joe Pearn conclut son témoignage par un message d’encouragement aux jeunes et à leurs parents. Il insiste sur l’importance de la curiosité et de la diversification des expériences dès le plus jeune âge. Plutôt que de mettre une pression excessive sur le choix précoce d’orientation, il recommande de favoriser la découverte, que ce soit par des engagements associatifs, des formations en ligne ou l’apprentissage des langues étrangères, un atout majeur dans un environnement juridique toujours plus internationalisé.
Il rappelle aussi la nécessité d’initier les jeunes aux nouvelles technologies, une compétence incontournable qui s’acquiert dès le lycée. Des formations spécialisées, comme celles proposées par la CNIL, sont accessibles et adaptées pour accompagner cette prise en main. Ainsi, les futurs juristes seront mieux armés pour évoluer dans un métier en pleine mutation, où le droit et la technologie s’entremêlent de plus en plus.
Perspectives d’avenir et ouverture vers de nouvelles aventures
Pour conclure cet échange riche en enseignements, Joe Pearn incarne parfaitement l’esprit de cette nouvelle génération de juristes qui embrassent pleinement la révolution numérique et les transformations profondes du secteur juridique. Sa trajectoire, ponctuée d’expériences variées, d’une curiosité insatiable et d’une volonté d’adaptation, illustre les compétences pluridisciplinaires désormais requises.
L’invitation à revenir partager son parcours chez Open Law, partenaire engagé dans la promotion de l’innovation juridique, témoigne aussi de l’importance des réseaux et des collaborations entre professionnels et jeunes talents. Ces interactions favorisent non seulement la transmission de savoirs mais aussi la construction collective d’un avenir où le droit, la technologie et l’entrepreneuriat se conjuguent.
Enfin, l’évocation d’autres profils atypiques, comme cette spécialiste d’informatique pratiquant la voile en solitaire tout en évoluant dans le droit, rappelle que les parcours professionnels sont de plus en plus diversifiés et personnalisés. L’ouverture d’esprit, l’audace et la capacité à saisir les opportunités seront, plus que jamais, des qualités clés pour réussir dans les métiers du droit de demain.
Besoin d’un accès fiable et à jour au droit des affaires ? Découvrez Lamyline – Domaine Affaires !